En première partie, avec cette citation de Lacan : « Voilà la grande erreur de toujours, s’imaginer que les êtres disent toujours ce qu’ils pensent. » l’exposé va porter sur le rapport entre penser et dire.
Partant de ce constat : « on ne dit pas ce qu’on pense, on ne pense pas ce qu’on dit », J.P. Winter va différencier le discours analytique d’autres formes de discours, qu’ils soient sociologique ou politique et va le rapprocher d’un discours philosophique, en particulier de celui de philosophes dits « de la liberté » tels Hanna Arendt (1) et Kant.
Au fond, ce qui est en jeu dans ce rapport du penser au dire, c’est la question de la responsabilité de nos actes liée, dans l’analyse, à la prise en compte de l’inconscient.
En effet, comment nous sentir responsables de ce que nous sommes sans nous bercer de l’illusion que nous sommes maîtres de notre destin ?
Hanna Arendt, tout en n’étant pas partie prenante pour la psychanalyse, s’est approchée d’une réponse qui prend vaguement en compte la division du sujet : toutes les facultés mentales possèdent une double rationalité, elles peuvent s’orienter sur le Monde ou sur elles-mêmes. Autrement dit, nous sommes contraints à penser le Monde (libido d’objet) et nous (narcissisme). Faire appel à la raison (à la suite de Kant) ne s’oppose pas à la psychanalyse pour laquelle c’est à la fois « Logos et Ananké » En d’autres termes, une psychanalyse aboutit à une plus grande responsabilisation à l’égard de nos actes tout en nous révélant qu’il n’y a de véritable liberté que dans l’acceptation du déterminisme. Et si le temps d’une cure est si long, c’est bien du fait de la résistance à se soumettre au déterminisme de l’ordre signifiant. Il est en effet plus confortable d’agir en référence au discours ambiant, à ce que Dostoïevsky appelait « la pensée servile » ou La Boétie « la servitude volontaire ».
Mais il y a un autre point d’importance concernant la responsabilité qui a trait à la place de la vérité dans l’analyse.
En deuxième partie, J.P. Winter reprend l’opposition qu’il faisait au dernier séminaire, entre les régimes totalitaires fondés sur la primauté du mensonge et la psychanalyse où la primauté est donnée à la vérité.
Dans l’analyse, on ne peut pas dire la vérité mais on peut lui désigner un lieu. Pourquoi ne peut-on que la mi-dire ? Parce que on ne peut l’atteindre que par le détour de la fiction, par le mensonge (protons pseudo de Freud). Dans l’analyse le mensonge n’est donc pas une fin, il est un moyen. Les mots trompeurs de l’analysant révèleront par là même sa vérité de sujet, au lieu où se croisent les points de capiton de Lacan, à la frontière entre l’image du moi (narcissisme) et le Monde (libido d’objet).
Le séminaire se termine sur le rapport de la vérité à ce qui fait le pouvoir : se méfier des hommes de pouvoir, c’est toujours leurs intérêts qu’ils servent quoiqu’ils disent ; exercer sa faculté de jugement et ne pas obéir aveuglément aux ordres (en exemple le procès d’Eichman déformant la pensée de Kant pour sa défense) ; enfin sur la place du pervers comme instrument dans le jeu du pouvoir.
↑↑(1) Hanna Arendt – Journal de pensées – (p.961)